beharrlichkeit

Beharrlichkeit
Octobre 2013
huile, encre, goudron sur toile brute et apprêtée
150 x 50 cm

Vendu mai 2015

beharrlichkeit complet


In situ

beharrlichkeit in situ 1

beharrlichkeit in situ 2

« L’expansion. Comme un cri à la puissance démultipliée, un cri témoignant d’une assurance fixe et rigide. Proche des moyens de l’arte povera, la toile employée ici est une toile brute récupérée dans une cave. La toile d’un sac de pomme de terre. La traçabilité des éléments à l’œuvre… La traçabilité… donne au geste une ampleur inédite. Chaque étape de la création est un geste assumé. Comme gonflée à la fois par une mémoire retrouvée et un oubli assumé, la volonté devient volonté de puissance. Volonté de puissance positive, force affirmative accréditée par la création artistique. « La force est ce qui peut, la volonté de puissance est ce qui veut », disait Deleuze à propos du concept nietzschéen.

Beharrlichkeit (n,f) : persistance, persévérance, ténacité, fermeté, constance »

Extrait du documentaire « Des galeries sous la montagne », 2013

Il s’agit de ma première composition en véritable patchwork. Les supports sont multiples et aident ainsi à la préparation d’un terreau de choix pour l’apparition du motif. L’arrière-plan bénéficie ainsi d’un grain épais et efficace, qui communique une brutalité et un aspect artisanal qui vont servir l’effet principal.

L’effet principal se situe dans le décalage d’un élément du support. Le motif se retrouve étrangement déformé à cause de ce glissement d’un morceau de tissu. Le motif est somme toute assez classique pour mon répertoire : un visage très expressif et grave. Mais l’effet de glissement exalte l’énergie déjà suscitée par la reproduction figurative pour créer une impression stridente qui décuple le bruit que semble produire le motif. Ma motivation était de façonner le visage comme un Rubik’s cube, en flirtant avec le cubisme pour imposer à la figure un aspect plus brutal.

La reproduction du visage a constitué la première étape. Le travail de la couleur sur l’arrière-plan est venue après, aussi ce travail sur l’arrière-plan a t-il suivi de près l’effet voulu par la figure centrale. Ainsi, d’un travail qui s’apprêtait à suivre une motivation plus simple, celle de vouloir sublimer le grain rustique d’une toile épaisse, l’exploitation de cette toile s’est faite de façon bien plus violente, à l’aide de goudron, de lames et de flammes. La captation réussie de cette violence due au glissement du support s’est retrouvée amplifiée dans l’exploitation violente du support, plusieurs fois mis à feu, lacéré, raccommodé.

L’énergie dégagée par cette violence n’est néanmoins pas statique. Le tableau ne brûle pas sur place, il se meut comme un magma en fusion. L’énergie s’articule selon certaines dynamiques qui concourent au même effet. De la même façon que le motif central subissait un glissement, la toile de fond semble se déchirer selon un axe central dans la partie supérieure : du sommet du tableau vers le centre. La toile a subi une déchirure en bas à gauche de la figure, une ouverture béante vers un tissu d’une couleur différente, comme une plaie béante. La poignée de porte nous rappelle le mouvement premier effectué par le cadre de porte qui sert d’armature: l’ouverture. Ce mouvement est amplifié par la direction donnée par le fameux bandeau central, de la gauche vers la droite, sens d’ouverture normal de la porte (la poignée est située sur le montant gauche). La tension ainsi suscitée par l’ensemble est celle d’une ouverture potentielle. Suscitée par un mouvement d’ouverture et en même temps empêchée par le resserrement du tissu en certains points nodaux. La « ténacité » évoquée par le titre trouve sa place dans la violence refoulée sous la surface de la toile.

Signature 2