Nemesis 2025

Les dernières contributions aux Nemesis Papers sont des gravures sur plexiglas, tirées en affiches, des affiches de campagne politique militant pour des élections tenues en 2035. Les tirages low tech, la variété des langues et contextes géographiques employés, le ton inquiétant des affiches font de l’avenir une esquisse parcellaire, mystérieuse. Cette représentation du futur, en inversant la flèche du temps, mêle une esthétique archéologique à une réflexion d’histoire contemporaine.

Free Tibet incarne la lutte contre le colonialisme à travers la lutte historique pour le Tibet libre. L’emblématique palais du Potala, résidence du Dalaï Lama, renforce cette utilisation symbolique, en soulignant le fait que le Tibet dispose déjà d’un palais, et donc d’une gouvernance. Dans cette série, Free Tibet est à la fois épuré et taché. La sobriété est propre au calme des cimes, et les tâches et marquent d’outils sont une trace de l’utilisation centrale de l’encre dans les cultures asiatiques. Le chinois écrit confronte directement les autorités responsables de la colonisation, mais il cherche aussi une audience large, et montre la présence croissante du chinois, surtout dans l’avenir qui sert de cadre à cette affiche.

Le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée porte l’orage » fait référence à un discours célèbre de Jean Jaurès. Cette affiche pacifiste utilise une image de Gaza sous les bombes en même temps qu’une citation de Jean Jaurès pour tisser une histoire longue du pacifisme, qui s’exprime à nouveau dans le cadre d’élections en 2035. La fameuse « IV » dont il est question est une référence cryptique à la quatrième internationale communiste. Un vote simultané dans plusieurs pays à travers le monde, un même parti, cela brosse le portrait d’un avenir dans lequel la mondialisation, jusqu’ici alliée du capitalisme, se retournerait en internationale communiste comme cela avait été envisagé au XXème siècle. Ici le nuage métaphorique dont il est question est incarné par un nuage d’explosion tortueux, surplombant les immeubles, devenus minuscules dans l’image, pour donner chair au monstre incontrôlable de la guerre.

Le succès dépendra moins de notre capacité à imposer notre volonté que de notre aptitude à modeler les comportements, des amis, des adversaires et, ce qui est plus important, de la population. » Robert Gates, secrétaire de la Défense américain, 2007. Modeler les comportements est justement fluide, trop fluide, nébuleux et brouillon pour être lisible. Le discours pacifiste tonitruant se mêle au bruit de la guerre dans un brouhaha indéchiffrable, non pas univoque, comme le montrent les plusieurs couleurs employées, mais proprement bruyant et stérile. Ce bruit et ce flou proviennent de la technique de gravure sur Tetra Pack, par laquelle les tirages ne peuvent être faits qu’en nombre réduit.

Monopoles industriels fait référence à l’autonomie et à la gouvernance des peuples face aux monopoles industriels, ici en Russie. Les parallèles avec la guerre actuelle en Ukraine se trouvent aisément. Dans l’illustration, une silhouette au centre se trouve noyée dans un complexe industriel bigarré, mêlant cheminées de centrales nucléaires, usines à charbon, raffineries, et cheminées typiques de la deuxième révolution industrielle, signe de la mise en danger des individus isolés dans le chaos des multinationales industrielles

Le Reichstagbrand (incendie du Reichstag) est un tournant historique pour l’Allemagne et l’Europe. Cet événement a été réutilisé dans l’œuvre éponyme pour montrer le danger de l’instrumentalisation des événements. La répétition actuelle des ressemblances avec les années 30 en Allemagne (voir Johann Chapoutot, Les Irresponsables) a été incarnée ici dans une atteinte au Parlement Européen, figuré, ou plutôt défiguré dans l’illustration. Sa représentation en symétrie verticale renforce le parallélisme historique. La rangée de drapeaux va dans le même sens que l’internationale œcuménique de la série.

Nemesis Papers 2024

« I also think it’s somewhat of a relief not to hear the true story.

I mean you look at the horror sweeping all the way up from my wrists to my elbows, and you have to take a deep breath and ask yourself, do I really want to know what happened there? In my experience, most people don’t. They usually look away. My stories actually help them look away.

Maybe they even help me look away. But I guess that’s nothing new. We all create stories to protect ourselves. »

« Et aussi, je pense, heureusement qu’on écoute pas la vraie histoire.

Je veux dire vous voyez l’horreur me grimper tout le long du bras, des poignets aux coudes, et il faut respirer un moment et se demander, est-ce que j’ai vraiment envie de savoir ce qui s’est passe ici ? De ce que je sais, la plupart des gens, ils veulent pas. La plupart du temps, ils détournent le regard. En fait, mes histoires, elles aident à détourner le regard.

Peut-être même moi aussi, elles m’aident a détourner le regard. Mais j’imagine qu’il y a rien de nouveau sous le soleil. On créé tous des histoires pour nous protéger. »

Nemesis Papers MMXXIV

« Ce que je raconte, c’est l’histoire des deux prochains siècles. Je décris ce qui viendra, ce qui ne peut manquer de venir : l’avènement du nihilisme. Cette histoire peut être dès maintenant contée, car la nécessité elle-même est à l’œuvre. Cet avenir parle déjà par cent signes, ce destin s’annonce de partout ; toutes les oreilles sont déjà tendues vers cette musique future. Toute notre civilisation européenne se meut depuis longtemps déjà dans une attente torturante qui croît de lustre en lustre et qui mène à une catastrophe ; inquiète, violente, précipitée, elle est un fleuve qui veut arriver à son terme, elle ne réfléchit plus, elle redoute de réfléchir. »[1]

Le livre se présente sous la forme d’une simple chemise à sangle contenant des feuilles libres, tel un dossier confidentiel. En deuxième de couverture, une lettre indique la provenance du livre : 2054. Ce dossier descend de l’avenir avec pour vocation d’avertir les lecteurs de la « fin du monde moderne » des années 2040 et 2050. Les auteurs de ce texte ont compilé des textes qu’ils ont assorti de travaux visuels aux techniques variées.

Les textes ne sont pas originaux, ils ont réellement été compilés. Il s’agit d’extraits d’essais philosophiques, d’articles de journaux, de témoignages tirés de périodes de guerre, ou bien de simples morceaux littéraires. Une bibliographie figure à la fin du livre, mais les références ont volontairement été omises des pages du livre afin d’entretenir une certaine ambiguïté sur la lecture des textes. Ainsi, bien que les articles portent sur des périodes contemporaines récentes (fin du XXème, début du XXIème siècle), ils offrent des prévisions pessimistes qui semblent augurer des textes à venir dans quelques décennies. Les témoignages de guerre datant de la seconde guerre mondiale résonnent étrangement avec les années 2040 dont il est question. La littérature, elle, est de ton apocalyptique.

Chaque page porte le nom de l’auteur de l’image originale accompagnant le texte, ce qui signifie que plusieurs styles se démarquent au fil du livre selon l’auteur. Chacun de ces noms est en réalité fictif et sert plutôt à caractériser un style, un ton, en le personnifiant. Les auteurs sont également caractérisés chacun par un bandeau différent, autant de bandeaux qui intègrent eux aussi des identités distinctes.

La technique encre-jet d’encre, qui consiste à aquarelliser des photographies à partir de tirages jet d’encre, permet de jeter un trouble sur les époques concernées. Ainsi, des images de la première guerre mondiale sont utilisées pour illustrer les années 2040. L’eau du tirage autorise ainsi un espace de trouble et de flottement. La dilution de l’eau nourrit l’ambiguïté du sujet, à cheval entre réalité documentaire et pure esthétique, entre signe et symbole, entre réalité tangible et interprétation spirituelle, à la façon d’un spectre. L’ambiguïté du résultat final est entretenue par le cotexte, qui ajoute des références, de la matière contextuelle et interprétative, mais dans le seul but de brouiller davantage les pistes au sujet de l’avenir. L’observateur est ainsi confronté à une pièce de puzzle, observant l’immensité du monde de demain à travers une lucarne trouble.

De son côté, le dessin permet de procéder à des montages, à des auscultations ou à des déformations de la réalité à partir de sujets bien réels. Par exemple, le style de l’Abbé Jérôme Eustache, sur la page « Nevers », permet de fragmenter la réalité dans une démarche cubiste, dans le cadre chaotique du bombardement de Nevers en 1944. Il en ressort une méditation sur l’implantation de la cathédrale dans le paysage, et la profondeur des âges dans laquelle elle s’inscrit.

Nemesis Papers est comme la lumière d’une étoile morte : elle nous parvient de loin et avec un décalage énonciatif dont les lecteurs deviennent archéologues. Avec ce livre, il s’agit de faire une archéologie du futur en auscultant des indices dans des artefacts usés par la descente du temps vers le présent. Cette auscultation ne laisse pas le lecteur sans une réflexion sur le paradoxe du contact entre futur et présent : pourquoi l’artefact s’arrête-t-il ici et maintenant ? À quel point ce paysage du futur est-il proche de la réalité ? Mais avant tout, que cherchent à communiquer ces associations de textes et d’images ?

Ces réflexions s’inscrivent dans une contemplation plus large de l’immensité du futur, de l’échelle écrasante des forces en présence dans la métamorphose du monde, de la lourdeur des enjeux liés à l’avenir, de la gravité des événements décrits, du miroir entre un passé chargé et un avenir mystérieux entretenu par l’opacité des informations communiquées. En bref, c’est dans un sublime noir que s’inscrit cette démarche. Mais la lourdeur du sublime a depuis Kant sa contrepartie de bonheur dans l’épanouissement moral du regardeur : ces réflexions lourdes nous proposent des voies ontologiques et éthiques prenant racine dans des enjeux tout à fait actuels.


[1] Nietzsche, La volonté de puissance, esquisse d’un avant-propos, §2, traduit par Henri Albert

Exposition Redoute Marie-Thérèse, 14 juin – 22 septembre

Les sujets proposés par l’artiste sont inattendus. Aucune marmotte, aucune edelweiss dans ces dessins, mais une montagne intérieure, celle dont on se souvient après l’avoir arpentée. Le ciel est symbolisé par une foudre biblique, les pics sont des cathédrales hugoliennes, la forêt se transforme littéralement en de vivants piliers baudelairiens, les fonds de vallon ouvrent des portes dantesques sous la montagne. Il s’agit bien d’art figuratif, mais qui s’éloigne d’une représentation en surface pour ausculter la teneur spirituelle d’une montagne personnifiée.

Robin Suiffet en donne la présentation suivante :

« La montagne est la terre qui se plie et donne une figure verticale. Une figure personnalisée d’ailleurs, puisque l’on donne des noms aux montagnes. On peut ainsi facilement se comparer à elles : la montagne, fixe, immuable, et avant tout gigantesque (combien pèse une montagne ?), et le randonneur, inconsistant, insignifiant, précaire. En opérant une comparaison entre la terre ainsi personnifiée et soi-même, l’observateur est renvoyé à la vanité de son existence et facilite la réflexion philosophique. »

L’exposition se tiendra du 14 juin au 22 septembre à la Redoute Marie-Thérèse, aux forts de l’Esseillon, Avrieux.

VERNISSAGE le 14 juin dès 17h.

Exposition Café Simone, Lyon, 10/01 au 24/02/2024

Exposition des dernières recherches sur le terrain de la gravure sur bois, le fusain, et le cadre considéré comme un medium en soi. Davantage d’informations sont disponibles aux liens suivants : http://robinsuiffet.com/lisieres/, http://robinsuiffet.com/oeuvre-au-noir-fusain-sur-bois-grave/, et http://robinsuiffet.com/biographie-demarche/.

Le livre Des Carnets sous la montagne y est en vente, au tarif de 10€.

Café Simone, 45 rue Vaubecour, 69002 Lyon

Ouvert du lundi au vendredi de 09h30 à 19h30.

Lisières

Le travail proposé sur ce site a poursuivi son exploration du principe du sublime en esthétique jusqu’à déborder sur le cadre.

Jusqu’à présent la quête s’était limitée à l’espace encadré par quatre bords. À l’inverse de la démarche classique des artistes en quête du sublime, qui favorisent les grands formats, j’ai cherché et trouvé mes destinations dans des formats modestes qui s’étendent non pas en surface mais en profondeur, dans la faille ouverte par le contraste.

En août 2023, dans la cathédrale de Gap, j’ai levé les yeux vers une sculpture de bois, un ange, en marge d’une chapelle latérale. L’ange, de toute évidence, avait été prévu pour mettre en valeur la chapelle latérale. Il trouvait d’ailleurs un binôme sur la paroi en face de lui, en la personne d’un ange semblable, symétriquement inversé. Mais alors que mes yeux devaient se porter vers la chapelle, entre ces deux anges, je suis resté sur l’un de ces anges, dont toute l’intention était portée hors-champ. Tout partait de lui, même la lumière parvenait d’un vitrail situé au-dessus de cette chapelle devenue solaire. La chapelle appelait cet ange comme un aimant. De là, en isolant cet ange, on parvenait à capturer l’immense magnétisme de cet aimant. Occulter la source magnétique accroît ce magnétisme, selon le principe de « pulsion scopique » cher à Jean Starobinski.

L’occultation a trouvé dans ma pratique une réponse renouvelée récemment dans l’œuvre au noir. Nous sommes parvenus à trouver une version (peut-être provisoire) de notre propre pierre philosophale dans la carbonisation. Le feu assèche le bois et le réduit à sa partie la plus minérale, réduisant sa matière à son essence la plus solide et sèche, dans un procédé semblable à la fossilisation. Le noir qui en résulte est le même que celui des montagnes, « amas noirs, lourds et compacts », dans lesquelles sont creusées les fameuses galeries. Ce noir est un condensé de matière, un noir souterrain et minéral, où se perd le regard dans un puits ou l’eau dans une faille.

De façon pratique, dans les deux dimensions sur lesquelles nous travaillons, ce magnétisme procède comme une troisième dimension, une pente dans laquelle sombre le pan travaillé, sur l’axe de la profondeur. Or afin d’équilibrer cette gravité, de la focaliser et ainsi de la renforcer, il convenait de la placer au centre du pan travaillé. Ainsi la partie claire se situe à la lisière de ce « puits » magnétique, là où se situe le cadre, de façon classique. Cette partie claire est celle qui est encore perceptible, sur laquelle le motif a encore sa place. C’est l’espace de la surface terrestre, celle du contact entre créateur (dessinateur figuratif, sculpteur) et regardeur (qui reconnaît le motif, qui sait lire les symboles), espace de visibilité et de luminosité. Le magnétisme s’accroît en direction du centre ; le motif se perd dans l’abstraction, la luminosité baisse, même la matière semble se dégrader, du bois solide à la poussière du charbon. Ce procédé offre une réponse technique à l’exploration du sublime : au lieu d’étendre la recherche vers l’extérieur du motif, et de procéder à une extension hyperbolique de la surface de l’œuvre (en jouant avec le risque de sombrer du sublime au grotesque), on place plutôt la destination au centre, inversant l’explosion en implosion, le macrocosme en microcosme, l’expédition en introspection.

Ora Labora et Invenies
Coming Into Focus

Matrices et estampes

Mes recherches portent sur la question du sublime. Elles avaient franchi une nouvelle borne dans l’utilisation du relief de la gravure sur bois pour servir le discours pictural. Récemment, le bois gravé a acquis le statut de matrice (un « tampon » en termes plus prosaïques), c’est à dire que j’utilise mes gravures pour imprimer sur papier. De cette utilisation ont découlé toutes les questions que se posent les graveurs. Mais un graveur traditionnel ne sort pas la matrice de l’atelier, elle reste un outil sans intérêt esthétique. La série « matrices et estampes » non seulement expose la matrice comme œuvre d’art à part entière, mais dévoile une dialectique entre la matrice et l’estampe, le bois et le papier, l’original et la série.

Ce dialogue prend place dans des motifs brutalement naturels, iconiques et apotropaïques, qui donnent voix à des paysages apocalyptiques (incendies et tornades, théâtre du sublime dynamique), immémoriaux (paysages préhistoriques) ou hostiles (planètes lointaines, horizon lointain du sublime mathématique), grognant une langue venue du fond des âges. Cette langue est traduite, de la matrice à l’estampe, au moment de l’impression. Elle perd son relief, de la même façon que nous avons perdu le sens de la nature dans le progrès technique. La matrice est mystérieuse, brute et pleine d’échardes ; l’estampe aplatit son sens sur le papier. La matrice énonce une vérité séculaire comme Cassandre, l’estampe comprend l’inverse (son opposé symétrique). La matrice est du côté du squelette, de la géologie et du pérenne ; l’estampe du côté de la chair, de la météorologie, du labile.

Pluton
Décembre 2022
Huile sur
pin cembro
et estampe
27 x 17 cm
Quod cogitatione tantum
 et mente complectimur
(que nous ne comprenons
que par l’imagination et la
pensée)
Décembre 2022
Huile sur pin cembro et estampe
32 x 12 cm

Prix Charles Oulmont 2022

Mes remerciements les plus sincères vont à la fondation Charles Oulmont, la commission d’art plastique et sa présidente Maria Lund pour l’attribution de ce prix. La famille Oulmont regorge d’artistes d’une grande humanité qui m’ont donné de l’inspiration, artistiquement et humainement, ainsi que de chaleureux encouragements.

Voici la présentation faite par la commission :

« Robin Suiffet déclare qu’il vit et travaille à Annemasse. Il se met sous l’égide d’une montagne qui se meut, qui peut se mouvoir, celle de Kant et du sentiment du sublime. Les titres des manifestations de Robin Suiffet, Infrastructures, Des Galeries sous la Montagne, Enterré sous le lac, Des Carnets sous la Montagne, génèrent un frisson d’inquiétude ; Ramuz n’est pas loin… Est-ce cette grande peur dans la montagne si proche qui inspire sa quête du sublime, sans cesse renouvelée dans la peinture, la gravure, le texte, le film ? Une quête conceptuelle qui s’ancre sur la matière, celle du bois entaillé de la pratique savoyarde traditionnelle, celle de la lumière qui continue l’entaille ou en métamorphose l’apparence, voire la colore, et enfin celle de l’eau qui vient diluer l’impression au jet d’encre pour instaurer dans l’image un espace de trouble et de naufrage, pour nous faire avancer sans tourner en rond dans la nuit. »

Nemesis 2022

« Ce que je raconte, c’est l’histoire des deux prochains siècles. Je décris ce qui viendra, ce qui ne peut manquer de venir : l’avènement du nihilisme. Cette histoire peut être dès maintenant contée, car la nécessité elle-même est à l’œuvre. Cet avenir parle déjà par cent signes, ce destin s’annonce de partout ; toutes les oreilles sont déjà tendues vers cette musique future. Toute notre civilisation européenne se meut depuis longtemps déjà dans une attente torturante qui croît de lustre en lustre et qui mène à une catastrophe ; inquiète, violente, précipitée, elle est un fleuve qui veut arriver à son terme, elle ne réfléchit plus, elle redoute de réfléchir. »

Nietzsche, La volonté de puissance, 1887

esquisse d’un avant-propos, §2,

Traduit par Henri Albert